Difficile d’en dire plus que tous les superlatifs qui accompagnent la formidable victoire de Barack Obama et du parti démocrate aux élections américaines de ce 4 novembre 2008!
Le flot de joie et d’espoir qui submerge les Etats Unis et le monde ne doit pas nous empêcher de réfléchir lucidement aux conséquences de ce que certains ont appelé « une élection
révolutionnaire ».
Les promesses sont considérables, puisque, selon le slogan même de la campagne d’Obama, il s’agit tout simplement- de « changer ». Les
difficultés qui l’attendent sont tout aussi fortes et il me revient à l’esprit le fameux cri de Bracke- Desrousseaux au moment de la victoire du Front Populaire en mai 1936 : « Enfin,
les difficultés commencent ! »
Au plan intérieur, il est vrai que l’attente est immense, mais que les problèmes ne manquent pas dans un pays qui, après avoir souffert de la politique marquée par l’idéologie libérale de
Bush, se prépare à vivre durement les conséquences économiques et sociales de la crise du système capitaliste. N’oublions pas que les électeurs
américains sont avant tout motivés dans leur vote par les questions intérieures et ils attendront d’Obama, qui leur a dit « oui, on peut » (« Yes, we can »), qu’il agisse avec
détermination, notamment dans le domaine social : fiscalité, salaires, santé, logement....
Pour nous, Européens, comme dans la plupart des pays du monde, l’attente n’est pas moins forte, mais elle touche essentiellement au nouveau rôle que pourrait jouer l’hyperpuissance américaine sur
la scène internationale. L’Amérique va-t-elle, peut-elle abandonner sa posture de puissance impériale ? Va-t-elle comprendre enfin que, dans le monde du 21ème siècle, les grands
problèmes de la planète exigent une gestion collective ? Continuera-t-elle à être obsédée par l’impératif de « sécurité absolue », qui, depuis le 11 septembre 2001, a conduit Bush et son administration à tant d’erreurs et de catastrophes dans les relations internationales ?
C’est cela que nous attendons de Barack Obama : qu’il mette en accord les actes des Etats Unis avec les mots si souvent utilisés par les responsables américains –la liberté, la paix, les
droits de l’Homme- ; qu’il rompe avec l’insupportable prétention de Bush et de ses conseillers néo conservateurs de vouloir incarner « le Bien », en lutte, par tous les moyens, y
compris les pires, contre « le Mal » ; que, par ses choix stratégiques, il exerce une influence positive sur l’équilibre et l’évolution du monde ; que les Etats Unis
deviennent un facteur d’arbitrage et non de blocage dans les conflits qui agitent le monde ; qu’ils prennent enfin la mesure de leurs responsabilités face aux grandes crises qui menacent
notre planète (alimentaire, sanitaire, environnementale, énergétique, financière ...)
Concrètement, sur la scène internationale, le nouveau Président sera notamment jugé par sa capacité à changer le cours de la politique américaine en Irak, en Afghanistan, dans le conflit israélo-
palestinien, dans l’affrontement larvé avec l’Iran et la Syrie. La tâche n’est pas mince, tant l’accumulation des erreurs et l’obstination de Bush ont terni l’image de l’Amérique sur tous les
continents.
Espérons, pour les Américains, pour nous et pour les citoyens du monde, que la dynamique créée par l’élection de Barack Obama et l’enthousiasme qui l’a accompagnée permettent de rendre possible
ce que certains croient pouvoir appeler une « révolution ».