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Le blog de Paul Quilès

Réflexions et informations sur la paix et le désarmement nucléaire, sur la démocratie et sur l'actualité politique.

La naïveté de l’Europe face à la Chine

Publié le 17 Juillet 2020 par Paul Quilès in International

La naïveté de l’Europe face à la ChineLa naïveté de l’Europe face à la Chine

Cet article, publié sur son blog par mon ami Jean-José Colomès, montre, à partir de la situation à Hong Kong, pourquoi l’Europe doit abandonner toute naïveté à l’égard de la Chine.

 

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Coup de gong à Hong Kong

 

 

Et pourtant, si l'on se réfère aux engagements écrits déposés à l'ONU, tout devait bien se passer....

 

Lorsqu'en 1997, les Britanniques rétrocèdent à la Chine leur ancienne colonie de Hongkong, il est prévu que jusqu'en 2047, les institutions hongkongaises seront maintenues, selon la formule « Un pays, deux systèmes ».

 

C'était oublier que la prédiction d'Alain Peyrefitte dans son ouvrage « Quand la Chine s'éveillera » deviendrait un jour réalité et que désormais conscient de sa puissance, cet immense pays gouverné d'une main de fer par Xi Jinping, attendrait la première occasion pour bousculer les échéances.

 

Ces opportunités se sont présentées sous deux formes. Ce furent d'abord, à compter de 2019, les immenses manifestations initiées par la jeunesse qui gagnèrent ensuite l'ensemble de la population hongkongaise. Elles revendiquaient plus de démocratie, ainsi que l'autodétermination. Insupportable pour Pékin.

 

Et puis vint la crise du Covid 19 partie de Huwan... La Chine fit preuve d'un manque total de transparence pour en déterminer avec certitude l'origine. On découvrit à cette occasion que dans le fameux laboratoire P 4 situé à Huwan et construit par la France, contrairement aux engagements qui avaient été pris par la Chine, les 80 chercheurs français qui devaient travailler sur le site, ne furent pas autorisés à prendre leurs postes.

 

Il y eut la gestion des masques dans laquelle on s'aperçut que le principal pays producteur, la Chine, livrait des produits défectueux donc inutilisables.

 

On découvrit les relations troubles entretenues par la Chine avec l'Organisation Mondiale de la Santé, laquelle tarda à admettre que l'épidémie touchait désormais la planète.

 

Il y eut la façon de gérer au niveau des Etats cette crise sanitaire, la Chine ayant choisi la méthode autoritaire et tentant d'exporter son « modus operandi » dans sa zone d'influence.

 

Il y a enfin et surtout, la naïveté dont nombre de pays parmi lesquels la France, ont fait preuve pendant des années à l'égard de l'ogre chinois. Accepter que dans la production du matériel médical, dans la fabrication de nombre de produits pharmaceutiques, nous nous mettions en situation de dépendance vis à vis d'autres pays, au premier rang desquels la Chine, a constitué une grossière erreur. Quand la rentabilité et l'appât du gain l'emportent sur toute autre considération...

 

C'est dans ce contexte que le 30 juin à 23 heures, veille de l'anniversaire de l'entrée en vigueur des accords signés en 1984 et appliqués depuis le 1er juillet 1997, que la population de Hongkong a découvert la loi sur la « sécurité nationale » adoptée dans le plus grand secret, qui prenait immédiatement effet.

 

Cette loi qui criminalise toute contestation, marque la fin de Hongkong en tant que territoire libre. Claudia Mo, députée du camp démocratique, l'analyse ainsi : « Cette loi est faite pour terroriser, intimider, réduire Hongkong à néant, faire de Hongkong une ville dans laquelle il n'y aura plus de dissidence, plus de manifestations, plus d'opposition ».

 

En six chapitres et soixante-dix articles, la nouvelle loi fait éclore quatre crimes : la sécession, la subversion, le terrorisme et la collusion avec une puissance étrangère. Ces crimes sont passibles de la réclusion à perpétuité alors que l'article 33 de la loi précise que les peines seront allégées si l'accusé dénonce une autre personne.

 

Les définitions des crimes ainsi instaurés, sont suffisamment vagues pour permettre aux autorités de réprimer toute manifestation d'hostilité au régime.

 

Tel a été d'ailleurs le cas, puisque le premier manifestant arrêté le 1er juillet en application des nouvelles dispositions, n'avait fait que se tenir debout, les bras croisés, une banderole appelant à l'indépendance, posée à ses pieds.

 

Cette situation fait dire à un juriste qui a souhaité préserver l'anonymat, « fondamentalement, Pékin va pouvoir arrêter n'importe qui, pour n'importe quel crime, puisque c'est Pékin qui a le pouvoir d'affirmer ce que vous avez fait de mal et en quoi c'est mal ».

 

L'effet attendu par Pékin n'a pas tardé à se manifester. La peur a envahi la rue. Les banderoles défendant la démocratie ont disparu des vitrines des commerces, d'ores-et-déjà, nombre de hongkongais ont pris la fuite à l'étranger.

 

A Taïwan, on n'est pas très rassuré. Dans cette île dont la Chine a toujours considéré qu'elle faisait partie intégrante de son territoire, la Présidente Tsaï Ing-wen a déclaré : « Le mépris de Pékin à l'égard des aspirations des Hongkongais prouve -qu'un pays, deux systèmes- n'est pas viable. Beaucoup de choses ont changé à Hongkong depuis 1997 mais le soutien de Taïwan aux hongkongais qui aspirent à la liberté et à la démocratie n'a jamais changé ».

 

Après la mort du Prix Nobel de la Paix Liu Xiaobo dans une prison, atteint d'un cancer en phase terminale et dont la Chine a refusé la libération pour recevoir des soins à l'étranger, nulle clémence à attendre de Xi Jinping. Les atteintes aux Droits Humains dans la province du Xinjiang contre la population musulmane des Ouïgours, en attestent malheureusement. Le nombre de détenus dans des camps atteindrait le million...

 

La répression ordonnée par Deng Xiaoping contre les manifestants de la place Tien anmen qui fit en 1989 des milliers de morts, n'est pas très loin dans l'esprit des Hongkongais. Certes, à ce jour, les chars n'ont pas fait leur apparition dans les avenues de leur ville. Toutefois, dans son projet d'accéder au rang de leader mondial, Xi Jinping considère que le moment est venu de tomber le masque face aux Etats-Unis, dont le Président a abandonné toute idée de multilatéralisme et alors que l'Europe est affaiblie par ses divisions.

 

Si le Canada a suspendu son traité d'extradition avec la Chine, si le Royaume-Uni a promis d'ouvrir la voie à la nationalité britannique à trois millions de hongkongais, les 27 pays de l'Union Européenne, l'oeil rivé sur les relations commerciales entretenues avec ce grand pays, ont condamné « du bout des lèvres » l'initiative de Pékin.

 

Le gong a retenti à Hongkong où la population est désormais sommée de vivre à l'heure de Pékin et il est certain que, si demain le rapport de forces le permet, le rattachement de Taïwan à la Chine continentale, sera la prochaine étape.

 

Sans épouser les outrances de Trump enferré dans la compétition des egos avec son concurrent chinois, l'Europe doit abandonner toute naïveté à l'égard de l'Empire du Milieu. Dans ses relations économiques et commerciales, elle doit exiger l'application de la règle de réciprocité notamment concernant les transferts de technologie.

 

Elle doit enfin, à voix haute et intelligible, rappeler au membre permanent du Conseil de Sécurité qu'est la Chine, l'obligation de respect des Droits Humains lesquels, à l'heure actuelle, sont sans vergogne foulés aux pieds.

Pour cela, il est urgent que l'Europe parle d'une seule voix.

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