Je n’ai pas l’intention de revenir sur le constat que partagent largement nos concitoyens, celui d’une situation désastreuse, où que l’on tourne le regard : un pouvoir désavoué par les urnes, une victoire incontestable du populisme, une défiance à l’égard des partis politiques et de leurs leaders, une désespérance qui gagne du terrain dans de nombreuses couches de la société….
Les "éléments de langage", les slogans, les invectives, les solutions miracles sont de peu de secours en pareille circonstance. Ce n’est pas une raison pour sombrer dans un catastrophisme démoralisant et peu efficace. Mieux vaut faire preuve de lucidité et essayer de comprendre les raisons profondes de ces maux, avant d’apporter des réponses.
En politique, il n’est jamais bon d’avoir raison trop tôt. Et pourtant, certaines surdités peuvent avoir des conséquences redoutables. Par exemple :
- Depuis des années (14 ans, pour ce qui me concerne), nous sommes nombreux à demander que les institutions de la Vème République évoluent vers un meilleur partage des pouvoirs et un meilleur équilibre institutionnel. Rien n’a été fait, bien au contraire (instauration du quinquennat et inversion du calendrier électoral), pour en finir avec un système de monarchie républicaine qui renvoie toute décision au sommet de la pyramide. On connaît les conséquences de ce détestable système: un Premier ministre qui « exécute » la politique définie par le Président, une majorité parlementaire contrainte, un parti majoritaire pétrifié, sans marge d’initiative, peu écouté et dont les militants, de moins en moins nombreux, s’interrogent sur leur utilité. Il ne suffit pas de faire signe à des sympathisants tous les 5 ans lors du vote pour la désignation du candidat lors des primaires pour établir un lien avec un électorat désabusé, désorienté et qui croit de moins en moins à la parole des politiques.
- Depuis près de 2 ans, dans la logique même de ce système, on refusait d’entendre les voix de ceux qui demandaient avec insistance que les promesses de la campagne de 2012 soient respectées et qui s’inquiétaient des conséquences du régime infligé au pays, tout en préconisant d’autres réponses à la crise. Et voilà qu’aujourd’hui, nombre de ceux qui s’étaient faits discrets jusqu’ici et parfois même qui défendaient la ligne suivie au sommet, joignent leur voix aux critiques et aux demandes de ceux qui étaient fustigés hier et souvent traités d’irresponsables ou d’incompétents ! Maigre consolation, car la question est bien de savoir maintenant quel peut être le débouché des initiatives un peu brouillonnes que l’on voit fleurir çà et là, alors que la logique même du système institutionnel de la Vème république empêche qu’aboutisse toute expression "déviante ".
La seule réponse me semble résider dans un sursaut de ceux qui croient encore au rôle - il est vrai très discrédité en ce moment- des partis politiques. Laissons l’UMP à ses (graves) turpitudes, qui affectent malheureusement aussi l’ensemble de la vie politique française et intéressons-nous au PS. Ses responsables doivent comprendre que des décisions fortes doivent être prises rapidement, pour éviter une dégringolade comme celle qui a été fatale à d’autres grands partis français au cours du demi-siècle écoulé.
Si l'on montre que le PS n’est pas un parti godillot, un simple outil de sélection de candidats, une chambre d’enregistrement, une agence de communication, qu’il est écouté et entendu, alors ses militants, en plein désarroi aujourd’hui, militeront et recréeront l'indispensable lien avec les Français, notamment ceux qui ont voté à gauche le 6 mai 2012.
Redonnons donc la parole aux militants. Cela passe par l’organisation rapide d’un congrès, seule façon de débattre en profondeur et de définir avec clarté le cap susceptible de rendre au PS une crédibilité actuellement très entamée.
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PS : En ces temps de déprime, il faut aussi se raccrocher à quelques petits bonheurs! J’ai apprécié à cet égard les propos de Claude Bartolone ce matin sur France Inter , ainsi que l’interview d’Emmanuel Maurel dans Libération d’hier.